12 avril 2006

Les personnages : Marion Deshayes

"Je suis morte un jour de pluie parce que j’adorais la pluie. Quand j’étais petite, je me cassais toujours la figure en glissant dans les flaques d’eau.

Marion Deshayes. C’est comme ça que je m’appelais.

Il m’était arrivé d’entendre des témoignages de gens ayant vécu des expériences de mort clinique ou de comas profonds. Certains disaient avoir traversé l’au-delà ou survolé leur propre corps pendant de longues minutes : leur récit m’avait toujours paru grotesque. De même que la religion, chimère bardée de légendes pittoresques, dictature lénitive affirmant qu’il n’existe qu’un seul Dieu, et que ce Dieu aime les Hommes, les protège tout en permettant qu’ils s’autodétruisent sauvagement à coups de machettes, de winchester, de gaz moutarde et de bombe atomique.

Je ne crois en rien et je suis morte toute seule parce que j’ai vécu toute seule, au milieu d’autres créatures qui pensaient pouvoir planter des drapeaux sur mon corps, voler des bouts de moi, des pigments. J’ai vécu toute seule une vie fugace pleine de chair, de sperme et de parfums légers, sans jamais me soucier de l’autre. L’autre n’aura été pour moi qu’un prédateur.

Le but de Marion Deshayes sur Terre ? Ne faire que désapprendre et tout réinventer."

Marion et la solitude. Marion et ce passé qui s’efface, se désintègre en quelques heures, en quelques jours. Et l’effroyable doute quant à savoir si cette douleur, cette violence, cette nudité permanente et ces visages qui la scrutent, si tous ces mensonges à répétition, ce n’est pas ça finalement, de mourir.

6 avril 2006

Les personnages : Samuel Deshayes

"Je prends mon appareil, Helena me sourit dans cette lumière blafarde, la peinture sur ses seins a dégouliné. Peu importe, nous échangeons ce long regard comme un sanglot, une accolade, un geste vain pour que tout s’arrête à la seconde. Derrière nous, Sergueï s’assoit, il boit sa bière en silence, je sais très bien ce qu’il pense. J’étais un artiste autrefois, l’homme qu’il aimait, un photographe. J’avalais la lumière, faisait sortir des corps la poésie et leur tristesse. Maintenant, Helena écarte les cuisses, je peux commencer à faire ce que je sais faire dans cette vie, ni de mieux ni de pire. Je prends des photos d’elle pendant une vingtaine de minutes, des photos crades de sourires fades, Sergueï est blanc comme un linge. Moi, j’ai déjà tout broyé dans mon cerveau, l’art, la poésie, le langage du corps, tout est déjà tellement loin.
Je m’appelle Samuel Deshayes. "
Samuel est photographe de charme. Marié à Florence Deshayes de qui il est séparé, il mène une vie dissolue entre aventures passagères et relations ambigues. Ancien artiste désabusé, homme égoïste, père fantôme, il voit sa vie basculer le jour où son beau-frère Alain vient lui annoncer l'accident de sa fille Marion, qu'il n'avait pas revue depuis quatre ans. Peut-on changer de vie comme le serpent quitte sa peau morte? Quand on décide de repartir à zéro, ceux que nous avons blessés nous en accordent-ils le droit?

5 avril 2006

Un roman à deux voix


Une Terre de Trop suit l'histoire des deux personnages principaux, en alternance d'un chapitre à l'autre. Le livre débute avec Marion Deshayes au volant de son véhicule, quelques minutes avant un terrible accident. Puis Samuel Deshayes, son père, fait son apparition dans le chapitre suivant. Suite à quoi l'on suit l'évolution des deux personnages à tour de rôle, avec un léger décalage temporel... Par exemple, Samuel apprend l'accident de sa fille alors que Marion entre à peine dans son véhicule. C'est ce mode de récit "en parallèle" de deux histoires étroitement liées que j'ai choisi pour vous raconter cette histoire, et ce procédé vous réserve bien des surprises...